Etat des lieux du BIM en France : Comment passer de la théorie à la pratique ?

BIM en France
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Pour ce nouveau rendez-vous de Vision d’Expert, j’ai eu le plaisir d’interroger Pierre Mit, Président de l’association buildingSMART France (anciennement Mediaconstruct) qui agit concrètement en faveur de l’opérabilité du BIM, notamment en format IFC. Pierre Mit est également économiste de la construction et a acquis une expertise du BIM au fil des années, depuis la création de buildingSMART en 1995. Avec enthousiasme et passion, il nous conte l’évolution du BIM au fil des années et le changement de regard porté sur cette nouvelle méthode de travail qui permet d’optimiser les activités et les processus de l’entreprise. Pierre Mit nous livre des solutions concrètes pour faire adhérer un maximum d’acteurs à l’utiliser de manière efficace et pérenne.

Sommaire

Le BIM : L’âge de raison après un emballement prématuré

Au début, on s’est un peu emballés… On a vu le BIM arriver comme la méthode révolutionnaire qui allait permettre de tout optimiser en un claquement de doigt. Or, la réalité a été un peu plus complexe dans la mise en oeuvre.

Tout d’abord, nous avons vu émerger les BIM Managers, bien formés à la technologie et aux outils, beaucoup moins aux besoins réels des métiers de la construction. J’aime les surnommer avec amusement « les ayatollahs du BIM » car ils sont venus chambouler les usages des entreprises de la construction avec des exigences parfois irréalistes. Pourtant, on s’est rendu compte qu’il valait mieux effectuer la transition pas-à-pas, de manière réfléchie et adaptée aux acteurs de la construction.

Comment adapter l’usage du BIM aux différents métiers de la construction ?

Pour que le BIM fonctionne dans les projets de construction et d’exploitation-maintenance, il faut embarquer tous les acteurs et leur donner l’envie d’adhérer à ce projet. On parle aujourd’hui de calibrer le besoin en fonction de l’utilisateur. C’est ce que l’on appelle le LON : « Level of need » (niveau de besoin) qui vient compléter, voire même remplacer le LOD « Level of detail » (représentation graphique) et le LOI « Level of information » (Informations nécessaires). Cela permettra de retrouver les bonnes informations sans se noyer dans un superflu d’informations pour l’utilisateur de la maquette. Chaque acteur, qu’il soit plombier, électricien ou maitrise d’œuvre a un usage particulier de la maquette. Il peut être « spectateur » (capable d’ouvrir une maquette et d’avoir les éléments nécessaires pour son métier). Cela donnera la possibilité d’accéder à la maquette et d’y trouver les informations dont il a besoin. La personne pourra visualiser les plans en 3D. Un acteur peut également avoir un rôle de « contributeur » et être, par exemple, amené à ajouter une pastille sur la maquette ou d’ajouter une demande auprès des personnes concernées. Il est donc primordial d’utiliser les informations à bon-escient en fonction du besoin. La vue d’une maquette peut effrayer l’utilisateur par sa complexité. C’est pourquoi il est préférable de rassurer, de sensibiliser les collaborateurs et de les rendre autonomes en fonction de leur usage.

Quels outils sont à privilégier pour piloter ses projets BIM en France ?

Avoir un outil qui permet de couvrir toutes les phases d’un projet semble la solution idéale à condition que celui-ci soit ouvert (OpenBIM). Il doit être capable de distribuer et de recevoir des informations de la part d’autres outils connectés. On ne sait pas toujours par avance qui va venir se greffer sur la maquette et qui va avoir des besoins. Et quand le projet s’étend sur les différentes phases, jusqu’à l’exploitation-maintenance, il va falloir compter avec une multitude d’acteurs qui viendront apporter des modifications sur la maquette.

Le passage obligé par la formation au BIM pour l’ensemble des métiers

Du charpentier au conducteur de travaux, en passant par l’architecte, chaque acteur doit être formé au BIM en fonction de son besoin. Ils ne sont pas obligés de tout maitriser dans les moindres détails. Cependant, ils doivent pouvoir au moins accéder, comprendre et exercer leur métier en prenant en compte ces nouveaux usages. buildingSMART apporte sa pierre à l’édifice dans ce projet en labellisant des formations dans différentes écoles (préparant aux métiers de la construction).

Aujourd’hui, des personnes vont développer cette culture du BIM en France et être préparés à utiliser la maquette de manière sûre et efficace. Il ne faut pas négliger le savoir du métier qui est fondamental. En revanche, il faudrait intégrer une formation à la technologie de la maquette pour une adhésion durable des constructeurs. Pour le moment, nous avons davantage besoin de personnes qui savent lire une maquette plutôt que de personnes qui savent créer une maquette. C’est l’exploitation de la maquette qui va faire une vraie différence et permettre d’optimiser les processus.

J’aime bien comparer le BIM à un morceau de musique qui peut être jouer par une personne au piano ou par un orchestre symphonique tout entier ! Les musiciens s’accordent entre-eux pour jouer leur partition en harmonie. De ce point de vue là, un outil comme WIZZCAD peut être séquencé en fonction des acteurs mais il faut que les informations soient partagées entre-elles pour ne pas se retrouver avec un modèle en silos.

Assurer les acteurs pour ce qu’ils doivent réaliser

Je souhaite aborder un autre point très important selon moi, c’est l’assurance. Il faudrait que chaque métier soit assuré pour les missions réalisées sur le projet.

En tant qu’économiste de la construction, je suis, par exemple, assuré pour faire de l’économie de la construction mais pas pour faire un calcul thermique ou une descente de charge.

Si chacun réalise les tâches pour lesquelles il est assuré, cela permettra de réduire significativement le risque d’erreur. Chacun doit garder sa responsabilité et faire son métier en utilisant des outils de collaboration et de production de la donnée adaptés. Si ce fonctionnement est mis en place et bien respecté, la transition vers le BIM devrait bien se passer… 

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